L'établissement thermal de Saint-Laurent-lès-Bains en Ardèche (Auvergne-Rhône-Alpes) au 19ème siècle. Chemins de randonnées: GR de Pays Le Cévenol, Tour de la Montagne Ardéchoise et GR®72. |
Au cœur d’une vallée sinueuse, là où un torrent capricieux tisse son lit de sable et de roches, se dresse le village de Saint-Laurent-lès-Bains. C’est un havre niché dans un décor qui évoque les contes anciens, où la nature règne en maître avec une beauté rude et indomptée. Les établissements thermaux, tels des phares dans la brume, promettent guérison et réconfort aux âmes en quête de soulagement.
Imaginez un chapelet de demeures, environ deux cents, s’égrainant le long d’une route départementale comme des perles sur un fil. Entre ces murs, durant la saison des bains, s’anime une mosaïque de vies : des baigneurs aux corps meurtris par les épreuves de la vie, des esprits en quête de renouveau. Certains avancent avec peine, d’autres s’appuient sur l’épaule bienveillante d’un proche ou la main secourable d’un aide. Tous sont unis par l’espoir que dans ces eaux thermales, de juin à septembre, ils trouveront la clé de leur renaissance.
Saint-Laurent-lès-Bains, avec ses silhouettes qui se dessinent contre l’horizon élevé, est un tableau vivant où chaque personnage joue sa partition. C’est un lieu où, malgré l’âpreté apparente du paysage, la vie bat son plein, portée par l’effervescence de ceux qui viennent chercher la promesse d’une eau miraculeuse.
Dans le sanctuaire de Saint-Laurent-lès-Bains, trois établissements thermaux se dressent, vastes comme des cathédrales dédiées à la détente. Mais hélas, ces temples du bien-être semblent avoir perdu de leur superbe, leurs murs résonnant plus de l’écho des plaintes que des chants de guérison. Les visiteurs, en quête de ressources salvatrices, trouvent les lieux dépourvus de l’essence même de leur promesse.
Les douches et piscines, qui devraient être des oasis de réconfort, semblent avoir été oubliées par les mains bienveillantes de l’entretien. Une seule douche, telle une relique d’un autre temps, se cache dans un recoin sombre, attendant désespérément une âme charitable pour lui redonner vie. Et pourtant, quelle force pourrait être libérée si l’on maîtrisait ce flot jaillissant à 45° Réaumur, tel un dragon endormi sous la roche ?
Quant aux bains ordinaires, ils ne sont pas sans défauts. Les cabines, trop peu nombreuses, semblent être des vestiges d’une époque révolue, et la température de l’eau, capricieuse, défie toute tentative de contrôle. Un cri s’élève pour un système de réfrigération plus sophistiqué, et pour une séparation respectueuse entre dames et messieurs, afin que chacun puisse se plonger dans ces eaux sans craindre le regard indiscret d’autrui. C’est un appel à la renaissance, à la transformation de ces lieux en véritables havres de paix, où l’eau et la chaleur se mêlent en une symphonie de bien-être, et où chaque âme peut trouver refuge et réconfort dans l’intimité de son propre sanctuaire aquatique.
Dans le sillage de la haute société, les établissements de Saint-Laurent-lès-Bains semblent dépourvus des fastes et des frivolités qui charment l’élite. Loin des salons cossus du faubourg Saint-Germain et de la Chaussée-d’Antin, ces lieux ne reflètent pas le luxe auquel aspirent ceux qui, à l’arrivée de l’été, délaissent la capitale pour des retraites plus clémentes. Ces estivants, habitués à l’effervescence parisienne, cherchent non pas le silence des eaux mais le prolongement de leur existence trépidante. Ils viennent ici non pour le repos, mais pour perpétuer le tumulte de la ville lumière, pour tisser des liens, poursuivre des intrigues naissantes, qu’elles soient de couloirs ministériels ou de salles de bal. Les dames, quant à elles, semblent en quête d’échos de conversations chuchotées, de mots suspendus dans l’air d’une soirée enivrante, espérant retrouver dans ces eaux le dernier souffle d’une phrase inachevée. Mais ici, dans ces murs qui résonnent d’un passé austère, les murmures de la capitale s’estompent, laissant place à une quiétude inattendue, un luxe d’un autre genre, celui du calme et de la sérénité.
Dans un monde où l’imaginaire se mêle à la réalité, Dieppe déploie ses charmes marins, caressant tendrement le rivage où se dressent de gracieuses demeures. Saint-Sauveur, Bagnères, Cauterets, ces noms évoquent les majestueuses Pyrénées, tandis que Carlsbad et Toeplitz résonnent des échos de royales assemblées. Bade, avec son élite, et Aix, avec les eaux azurées du lac du Bourget et les échos mélancoliques de la cascade de Grézy, complètent ce tableau.
Dans les salons où les conversations bruissent, sous les allées ombragées des parcs, et à la lueur des lustres dans les salles de bal, seules les visages frais et souriants sont de mise. Le plaisir, tel un maître de cérémonie, distribue ses sourires, ses parfums et ses fleurs. Même la maladie semble revêtir ses atours de gala, et les marques du temps se dissimulent sous le pinceau habile de l’artiste. Il convient de saluer les efforts de M. Merand, qui, avec peu de moyens mais beaucoup d’intelligence et de bonne volonté, a su améliorer et adapter les deux établissements qu’il préside à leur noble vocation.
Pourtant, pourquoi n’a-t-on pas encore vu surgir un de ces visionnaires, toujours à l’affût d’une nouvelle aventure, qui aurait l’idée lumineuse d’acquérir les droits sur ces eaux miraculeuses pour y ériger des établissements à la hauteur de leur renommée ? La fortune, sans aucun doute, lui sourirait rapidement. Depuis longtemps, il est reconnu que les eaux de Saint-Laurent possèdent des vertus thérapeutiques inégalées. Si l’aristocratie délaisse ces lieux, c’est uniquement par manque d’un cadre digne de leur rang.
Au pied d’une montagne granitique, gardienne de ruines d’un passé lointain, s’écoulent les eaux de Saint-Laurent. Elles jaillissent avec une vigueur inégalée, chargées d’un trésor de minéraux : carbonate de soude en abondance, chlorure de sodium, sulfate de soude, silice et alumine. Ces éléments, baignés d’une chaleur de 45° Réaumur (
), émergent du cœur de la pierre avec une vitalité rare.Dans ces eaux se trouve aussi la mystérieuse barégine, une substance organique dont les secrets restent voilés à la science. Elle se manifeste en une gelée limpide, signature exclusive des eaux sulfureuses naturelles, et semble être la clé de leur bienfait miraculeux. La pureté de leur teinte est d’une clarté saisissante; même confinées dans le verre d’une bouteille, elles conservent leur essence intacte, défiant le temps sans jamais se flétrir.
Les eaux de Saint-Laurent, bien qu’elles portent en elles le pouvoir de guérison, s’échappent avec une fragrance qui n’est guère accueillante. Elles rappellent, dans leur parfum, la réputation sulfureuse des œufs oubliés, leur odeur variant avec les caprices de l’air. Insipides, elles glissent dans la gorge, éveillant une sensation subtilement vivifiante, comme une boisson qui titille les sens sans jamais les submerger.
Mais au-delà de leurs vertus curatives, ces eaux détiennent un don presque magique : elles redonnent vie à la végétation fanée. J’ai vu des gentianes flétries et des brins de perlière, plongés dans leur source, se redresser et retrouver l’éclat de leurs couleurs, comme si elles étaient touchées par une baguette enchantée. Cependant, je reste sceptique quant à leur capacité à restaurer le doux parfum des fleurs, car certaines qualités semblent hors de portée même de cette source miraculeuse. Les habitants de la région ont trouvé une autre utilisation pratique pour ces eaux : elles servent de savon naturel, rendant le linge et la peau d’une blancheur éclatante.
Laissez-moi vous conter les vertus cachées des eaux de Saint-Laurent, qui se dévoilent dans l’intimité des bains, la caresse des douches, la douceur des boissons, ou encore le voile des vapeurs. Pour en saisir pleinement les bienfaits, il faudrait revêtir la blouse du médecin, observer avec une attention de lynx les patients immergés dans ces eaux bienfaisantes, et en déduire les mystères de leur guérison.
C’est ici que M. Maurice Fuzet du Pouget, l’inspecteur érudit et humble de ces eaux, entre en scène. Son savoir, aussi vaste que les profondeurs des sources, pourrait éclairer le monde sur les miracles quotidiens qu’il observe. Je l’implore, non pas en critique mais en fervent admirateur, de partager ses découvertes. Que M. Fuzet du Pouget ne voie pas dans mes mots une remontrance, mais un appel à révéler au grand jour les secrets de ces eaux.
Car, au-delà des analyses déjà réalisées, il reste un océan de connaissances à explorer, pour y dénicher le principe actif, la clé de la guérison. Dans les entrailles de la terre, dans chaque source, sommeille un mystère qui n’attend que la perspicacité d’un esprit curieux pour être dévoilé. Les eaux de Saint-Laurent ne sont pas une exception; elles invitent les savants et les médecins à plonger dans leurs abysses pour en ramener la lumière.
Dans les profondeurs de Saint-Laurent, les eaux s’élèvent telles des guérisseuses antiques, offrant leurs bienfaits en bains et douches. Elles sont le baume pour les rhumatismes fulgurants, la lumière pour ceux que la paralysie a plongés dans l’ombre, le soulagement pour les douleurs de la goutte et de la sciatique, et le réconfort pour les visages marqués par les névralgies. Même la surdité, cet isolement silencieux, trouve un écho dans le murmure de ces eaux, qui dénouent les obstructions avec une douceur décursive.
Les affections cutanées, ces maladies aux visages multiples et tortueux, se transforment sous leur toucher. Les os brisés et les articulations meurtries se remettent en place, comme si ces eaux étaient imprégnées de l’essence même de la vie.
Chaque jour, les miracles s’inscrivent dans la chair et l’esprit de ceux qui se baignent dans ces eaux. Et pourtant, il semble que leur potentiel reste méconnu des yeux du gouvernement. L’hôpital militaire de Bourbonne-lès-Bains, bien que fondé par des rois et enrichi par les siècles, ne suffit plus. Un nouveau sanctuaire de guérison à Saint-Laurent serait un hommage juste et mérité pour nos soldats, ces héros marqués par les stigmates de la guerre, qui méritent de retrouver force et santé dans l’étreinte de ces eaux. Un tel établissement, dédié à nos protecteurs, ne ferait qu’embellir les lieux, sans jamais éclipser les établissements civils qui partagent son souffle de vie.
Dans un recoin reculé, où les eaux chantent leur mélodie incessante, se dressent des établissements solitaires, chacun bercé par le murmure de la rivière. Imaginez, si vous le voulez, que ces eaux généreuses suffisent à combler les désirs de chaque lieu, comme une mère veille sur ses enfants dispersés.
Puis, laissez votre regard se perdre sur le panorama mélancolique de Saint-Laurent : les toits gris des bâtiments de l’hôpital militaire s’entremêlent avec la majesté sombre des montagnes, tandis que les rochers stoïques encadrent le village. La gorge, étranglée et dépouillée, porte les cicatrices des avalanches et des torrents furieux, comme un tableau vivant de la nature indomptée.
Les eaux de Saint-Laurent, capturées en boissons et en vapeurs, sont un baume pour l’âme et le corps. Elles infusent souplesse et vitalité, chassant les douleurs asthmatiques et les maux catarrhales. Les glandes gonflées, les foies et les rates envahissants, tous se plient sous leur influence bienfaisante. Et dans leur sagesse, elles guérissent même le spleen, cette ombre qui rôde dans l’esprit, menaçant d’engloutir la jeunesse dans le désespoir.
Chaque voyage porte en lui une histoire, une anecdote qui donne vie à l’expérience. En tant que conteur respectueux de son auditoire, je vous offre la mienne, brève mais authentique. C’est un fragment de vérité, un souvenir presque historique, que je dépose humblement à vos pieds.
Il y a près d'un siècle, dans la vallée de l’Allier, un prieur de Laveyrune, homme de foi et de parole, qui, du haut de sa chaire, déclamait avec fougue contre l’ivrognerie, ce fléau des montagnes. Son éloquence peignait avec vigueur les conséquences funestes de ce vice, devant un auditoire captivé mais sceptique.
Dans le même temps, deux paysans, dont l’allure trahissait une certaine aisance, marchaient côte à côte, indifférents aux sermons du prieur. Leur chemin les menait vers un cabaret, dont l’enseigne verdoyante dansait au vent comme une promesse de réconfort. L’un se lamentait sur une source d’eau chaude qui jaillissait sous sa demeure, la jugeant inutile. L’autre, flairant l’opportunité, s’empressa de proposer un échange : la fontaine contre une veste de cadis, ouvrage de sa femme Jacqueline pour la fête de la Toussaint.
Le marché fut conclu, et le notaire de Saint-Laurent scella l’accord sans tarder. Qui des deux fut le plus rusé ? L’histoire ne le dit pas. Mais la fontaine, devenue héritage familial, est restée dans les mains de l’acquéreur initial. Les descendants, aujourd’hui, pourraient bien la céder, mais à quel prix ? La veste de cadis n’est plus qu’un souvenir usé, et nul doute que la compensation demandée serait bien différente.
Ancien hôtel de villégiature avec un jardin au bord de l'Allier, L'Etoile Maison d'hôtes se situe à La Bastide-Puylaurent entre la Lozère, l'Ardèche et les Cévennes dans les montagnes du Sud de la France. Au croisement des GR®7, GR®70 Chemin Stevenson, GR®72, GR®700 Voie Régordane (St Gilles), GR®470 Sources et Gorges de l'Allier, GRP® Cévenol, Montagne Ardéchoise, Margeride et de nombreuses randonnées en étoile à la journée. Idéal pour un séjour de détente et de randonnée.
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