L'histoire du Mont-Milan, oppidum romain, situé entre le Lac de Naussac et l'Allier près de Langogne en Lozère (Occitanie). |
Son nom pourrait être
tiré de « milia », mesure qui chez les Romains valait « mille pas » et était représentée par des colonnes séparant les distances sur une « via », comme le font les bornes kilométriques sur les
routes.
Plus probablement, son nom vient de sa position au milieu des eaux « medio aquae millac, miliacum, millacense » si l'on convient que ce camp se trouvait, pour les trois quarts de sa circonférence,
cerné par les eaux de l'Allier et du Donozau. Certains ajouteraient le lac de la Ponteyre si son existence controuvée était admise..
Une explication sur sa
destination de « mont de soldats » justifierait une appellation de « citadelle de soldats » par la désignation « mons militum ou militum arx ».
En tout cas, le nom est effectivement celui de la viguerie dans laquelle il était inclus.
La légende en a fait le camp de César, bien que, vraisemblablement, ce général Romain n'y ait jamais passé les pieds. Seules ses légions ayant pu y séjourner, ou plutôt des troupes d'occupation
transalpines au moment de l'invasion ayant pu en faire un camp retranché.
C'est une forteresse naturelle parfaitement appropriée à la défense.
Des pentes escarpées, rocailleuses, dénuédées, protègent une plateforme sise à 200 m. au-dessus du niveau de l'eau, alors que des fortifications aménagées sur les autres pentes en faisaient un camp inexpugnable. Sur le sommet, une périphérie ovale, à axes respectifs de 210 et 100 m. pour une superficie approximative de deux hectares était ceinturée de murs à pierres sèches formant bastion, à deux faces, abrupt à l'extérieur, surélevé à l'intérieur et même longé d'un fossé pavé pour l'écoulement des eaux. L'entrée, côté La Valette, était défendue par des redoutes, maintenant démantelées, mais dont l'existence est révélée par des amas de cailloux entassés à proximité.
Du côté du Cheylaret, on devine, à mi-pente, un
contrefort aménagé en défense. Un prétoire, érigé au milieu du terrain, sur un promontoire rocheux dominait la plateforme et devait être le poste de surveillance et de commandement. Des tas de
cailloux roulés, certainement apportés de la vallée, dénoncent les moyens de défense usités. La ceinture d'eau des rivières et des marécages de la Ponteyre complétaient l'isolement du castra,
véritable place forte, difficile à emporter. Son seul point faible était un manque total d'eau potable qui aurait rendu précaire un siège de quelque durée.
Cette erreur de formation d'un camp retranché confirme bien l'avis de César, quant à l'incompétence des Gaulois dans la guerre de défense. Elle se signalait déjà à Uxelladum, où l'armée investie,
manquant d'eau, détachait la nuit des pourvoyeurs pour assurer un indispensable ravitaillement. Le chef romain postait frondeurs et archers et paralysait l'apport d'eau nécessaire au camp.
On a supposé que le Mont-Milan, oppidum romain n'avait jamais été un camp Gabale, du fait qu'aucune trace de murs édifiés suivant la méthode Gauloise n'avait été constatée. L'absence de fortifications à alternance d'un lit de pierres brutes et de poutres couchées dans toute leur longueur et amalgamées par de la terre, de façon à rendre inopérantes les machines de guerre, béliers, catapultes, de l'assaillant, s'explique du fait que les Romains succédant aux Gabales avaient substitué leurs propres conceptions de fortifications à celles plus primitives de leurs ennemis.
Le soc de la charrue et
les fouilles entreprises n'ont mis à jour que des médailles, monnaies, débris d'armes, essentiellement romains, pourtant des tessons de poteries exhumés n'impliquent pas leur provenance exclusive des
légions césariennes. Leur ancienneté et leurs caractéristiques détermineraient une date antérieure à l'an 27 avant Jésus-Christ, c'est-à-dire précédemment à l'invasion. Quant à la désignation de camp
de César, transmise à travers les âges, elle demeure très hypothétique. Le grand général Romain ne semble pas être venu en Gévaudan.
L'histoire conte, en effet, que la conquête du pagus Galvadanus fut l'œuvre de ses lieutenants. Donc, pour qu'il ait stationné au Mont-Milan, il faudrait admettre son passage au cours d'une
marche vers l'Arvernie, par la Regordane, alors qu'il revenait de mater une rébellion de la Narbonaise.
M. Ignon conclut à cette possibilité, d'ailleurs recopiée, sans contrôle, par M. l'abbé Fourcher et par M. Grasset. Or, c'est mal interpréter les Commentaires que d'arriver à cette
conclusion.
Le livre VII dit : « Pour
franchir la montagne Cévenne qui élève une barrière entre Arvernes et Helviens, César fit enlever la neige qui obstruait la route, dans la saison la plus dure de l'année et au prix de l'énorme
fatigue de ses soldats, parvint aux confins de l'Arvernie ».
L'erreur de M. Ignon et de ses copistes est par conséquent en contradiction avec le texte des Commentaires. Parti de chez les Volques Arécomiques (Gard), César n'emprunta pas la Régordane mais entra
chez les Helviens pour rejoindre son armée massée à Aps (Alba Helviorum) et la porter sur Gergovia, en marche forcée, via St-Cirgues-en-Montagne, Revesio et Brivate, déblayant la neige, surmontant
les obstacles et tombant à l'improviste sur ses ennemis commandés par Vercingétorix.
Ainsi donc, Langogne ne se trouvant ni sur la route d'invasion, ni de repli des Légions, César n'a pu séjourner au Mont-Milan. Tout au plus pourrait-on admettre que des cavaliers, placés en
flanc-garde de l'armée, se soient détachés pour razzier et piller, suivant les méthodesde guerre usitées, et protéger, en même temps, le gros de la troupe contre toute attaque par surprise, et soient
venus échouer à l'oppidum. Ou encore que dans leur mouvement de retraite, les légions, qui avaient évité d'attaquer un ennemi trop supérieur, aient stationné, au cours de leur repli, au Mont-Milan
pour un nécessaire repos, tandis que César, abandonnant son commandement, s'en aillait en marche forcée, à Vienne.
S'il était besoin d'autres considérations, on avancerait l'impossibilité de loger une armée de 24.000 hommes plus ses impidémenta, sur une plateforme de 2 hectares au cœur de l'hiver. Aussi doit-on convenir que l'oppidum n'a été occupé par les Romains qu'au moment de leur invasion du pays Gabale. Certes, il est regrettable de détruire une belle légende et d'écarter de Langogne la grande figure de César, l'adversaire du mémorable chef Gaulois Vercingétorix. Heureusement, il est des réminiscences tenaces, qui aident à la maintenance des souvenirs, surtout si elles s'accolent à l'énigmatique époque druidique affublée de ses pratiques païennes comme celle de l'adoration du veau d'or, dans la forêt sur les flancs du Mont-Milan.
On sait que l'âme simpliste du Gabale, adorateur de Tentatès et d'Esus, cultivait un amour passionné pour son Foyer et pour sa Patrie. Des cérémonies exaltantes s'accomplirent à l'heure de l'envahissement, rappelées dans l'épisode de Valléda des Martyrs de Chateaubriand : « A la nouvelle que César franchissait les Cévennes, les guerriers Gabales, réunis dans la forêt du Mont, plongeaient dans le lac, porteurs de flambeaux qui faisaient étinceler les armes, formaient une longue procession d'une tristesse infinie. Les bardes, au son de la hrote chantaient les louanges du dieu que l'on allait ensevelir. Le druide immola une victime dans les entrailles de laquelle il vit un avenir inquiétant, puis dans une fosse ouverte, il cacha la faucille d or et les objets du culte ; les guerriers y enfouirent leurs armes. Puis le druide prononça une allocution exaltant la détresse et l'espoir. Tous jurèrent de conserver leurs traditions celtiques et de garder leur foi au dieu Teutatès et aussi à Esus, l'invincible, jusqu'au jour où délivrés de l'envahisseur, ils relèveraient leur culte abandonné et déterreraient leurs armes de guerre, fidèles à leur pays ».
Hélas ! les druides furent persécutés, la religion s'étiola, les pratiques païennes s'implantèrent. Pourtant le Gabale gardait ses souvenirs et la vision d une religion proscrite. La geste Gauloise demeurait. Malgré les édits d'Auguste, de Tibère, de Claude, en cachette, il rejoignait le druide dans la forêt pour pratiquer un culte qui tournait vers une sorte de paganisme par la vénération de certains animaux sculptés parmi lesquels dominait le taureau, à la fois victime du sacrifice et symbole de la puissance et de la force. Ce taureau prenait le pas sur les divinités exotiques du Celte. Sa sympathie allait également à la Grand-Mère, la Mère des dieux, la Cybèle Phrygienne dont l'adoration se propageait au temps des Marc-Aurèle et Antonin.
La manifestation la plus extravagante fut le taurobole consistant à immoler un taureau sur une fosse recouverte d'une claie. Le fidèle placé dessous recevait le sang de la victime. Il sortait hideux, souillé de sang, mais lavé et purifié. Ces cérémonies recevaient grand concours et étaient pratiquées devant la foule accourue. Particuliers, magistrats, décurions, prêtres du culte ou galls, émasculés, fardés, se tailladaient la chair, secouaient leur chevelure, trépignaient, se contorsionnaient ; une corporation deudro-phores fournissait le pin sacré porté devant la déesse comme emblème, ensuite venaient les joueurs de flûte, les danseurs de Cybèle, les desservants de la Grand-Mère, tout un clergé irrégulier, errant, mendiant, suspect. La fête se poursuivait par processions, initiations, rites, compliqués, bizarres. Elle se terminait par l'inauguration d'un autel commémoratif portant la tête du taureau enguirlandée et décorée de l'épée qui l'avait frappé.
Les tauroboles attiraient haine et colère des chrétiens. Leur antagonisme s'exerça contre les dévots de Cybèle et les poursuivit au Mont-Milan. St-Grégoire de Tour prêchait contre cette forme de paganisme qu'il rapprochait de la folie des Hébreux adorant le veau d'or, tandis que Moïse sur le Sinaï, recevait les Tables de la Loi. La lutte s'intensifia devant un culte d'ailleurs inexplicable. La légende Gabale, symbolisée par un taureau à la tête et aux cornes puissantes, représentant la force, le courage, s'admet alors que se pose la question : comment ce peuple en était-il venu à vénérer un veau ?
Le souvenir demeure d'un
veau dressé sur un piédestal que la foule idolâtre entoure et fête, et aussi d'un chritianisme, déjà répandu, fougueux, fanatique, qui dresse les croyants contre des pratiques d'un monothéisme
opposé. Il ameute ses fidèles et pourchasse le culte impie. Les rivalités de croyance engendrent des rixes sanglantes et les adorateurs du veau d'or ne peuvent plus exercer leurs cérémonies que la
nuit dans l'étrange décor de grands bois du Mont-Milan. Leurs adorations se poursuivent mais dégénèrent en batailles rangées qui amènent une cessation de leurs pratiques. L'emblème de leur culte, par
trop compromettant est enfoui aux flancs de la colline dans l'espoir de le déterrer un jour.
Les lustres ont coulé, les protagonistes de la singulière évocation se sont éteints sans révéler le lieu d'enfouissement du veau d'or, demeuré introuvable, malgré, dit-on, fouilles et recherches. Le
problème reste posé: où se cache le veau d'or du Mont-Milan ?
Ainsi s'est endormie la légende du veau d'or !
Il est reconnu que le Mont-Milan est un monticule au milieu des eaux qui le bordent : l'Allier, le supposé grand fleuve de l'Aquitaine première ; l'écoulement clapotant du ru du Donozau traversant des berges fangeuses de ce qui est appelé l'ancien lac de la Ponteyre. Mais y eut-il jamais un lac à la Ponteyre ?
Des historiens se sont penchés sur le pays Gabale et qu'ils aient noms : Cord et Viré, Fourcher, Ignon, Grasset, Lhermet, Aimeras, en se recopiant, ont nommé ce lac, sans s'inquiéter de la réalité de son existence. Certains ont parlé, en poètes, de « ses ondes profondes » faisant allusion, sans doute, au récit de Grégoire de Tours disant : « Trois jours de suite, sur les bords d'un lac Gévaudanais, la foule s'entassait pour faire des libations et des sacrifices. Elle jetait dans les eaux des pans d'étoffes, des toisons de laine, des fromages de cire, des pains, sans parler de plus riches offrandes et c'étaient des "fêtes et des orgies que venaient enfin interrompre les orages suscités par les dieux en colère ». D'autres, moins prolixes, se sont contentés, en désignant la voie Régordane (GR®700), de rappeler qu'elle passait aux flancs de l'oppidum et « côtoyait la rive du lac ». L'un d'eux a vu une hypothétique agglomération « en ces lieux, pourvus d'un sanctuaire où les foules pieuses se rendaient en pèlerinage ».
Voilà comment s'écrit l'histoire. De cette supposée réunion d'habitations, de ce sanctuaire, pas la moindre trace. Pourtant, il est des empreintes pour ainsi dire ineffaçables. Les charbons de feux restent apparents, des débris de poteries, des objets de pierre éclatée ou taillée ou de métal, des monnaies, etc... se décèlent. Les nécropoles ou pour le moins des sarcophages, à la rigueur de simples tumulus marquent le séjour des hommes. Or, rien, absolument rien, n'a été découvert jusqu'à ce jour. L'avenir reste-t-il prometteur de quelque sensationnelle révélation ? On avait pensé à des demeures lacustres sur le lac, mais pas un pieu, pas le moindre pilotis, n'a été remarqué.
Tous les épistoliers précités se sont accordés pour parler d'un travail de « romain » employé à ouvrir, entre les collines de Naussac et du Mont-Milan, une faille destinée à donner passage à un minuscule ru, le Donozau et assécher, en même temps, de ses eaux dormantes, le lac de la Ponteyre. A contempler la besogne eyclopéenne exigée pour l'ouverture de cette trouée, on demeure sidéré que des écrivains sagaces n'en aient pas vu l'inconcevable réalisation. Non seulement est inadmissible le creusement de la vallée mais avec les moyens précaires de transport de l'époque où diable auraient été logés les déblais puisqu'il n'y a pas d'entassement aux environs ?
Et pour quelle utilité les Romains se seraient attelés à pareil travail, qui ne pouvait qu'affaiblir la défense de l'oppidum en asséchant un lac qui le protégeait et en supprimant un réservoir poissonneux, précieux pour leur alimentation ? On n'imagine pas qu'il soit entré dans leur intention de récupérer un terrain sans utilité alors que tant d'espace restait inculte. D'autres arguments, d'un autre ordre, confirment qu'il n'y a pas eu de lac à la Ponteyre.
En examinant la vaste cuvette qui aurait contenu le lac, on voit, dans le beau panorama vers la Tuilerie, Barre, Bonjour, jusqu'à Rocles, des terrains de culture ou des prairies, assis sur le gneiss capitonné d'une coulée basaltique venue du volcan pliocène et qui n'ont aucune apparence de berges nautiques et pas la moindre stratification de sédiments résultant du séjour d'une nappe d'eau ; à partir de Rocles vers Besses et Eriges s'étale une pénéplaine de la période pléistocène façonnée par la disparition de l'ère glacière où ne se manifeste pas la moindre corrosion pourtant constantes sur les bordures des eaux mouvantes d'un lac ; la falaise granitique, d'âge stampien, qui, de Eriges à Naussac, borde la dépression de la Gazelle possède des formations détritiques de conglomérats, grès, argiles sableuses et de couleurs rutilantes, qui ont fait dire, à la légende, qu'elles étaient teintées du rouge d'un saignement de nez de Gargantua, alors qu'il s'en allait de Montpellier vers son pays de Beauce. Des crevasses à compartiments abaissés n'ont pas les stratifications de sédiments par couches superposées d'ordinaire déposées par les eaux dormantes.
Par contre, le cours du Donozau montre des sables très purs, caillouteux, de quartz roulés et de jaspes fossiles bajociennes du type jurassique moyen ou colithe inférieur. Son vallon est régulier à faible pente, démontrant le cours paisible d'un ru évacuant ses eaux de source, sans risque de crue torrentielle, à travers le bas-fond d'une cuvette qui n'a ni aspect, ni résidus d'un lac. L'examen de ses méandres ne montre pas non plus de stratification qui seraient du reste en contraste avec les berges vaseuses, simples fondrières à crevasses, garnies de végétaux en putréfaction en parfaite similitude de fonds tourbeux. Or, la tourbe ne se produit-elle pas dans les parties planes où s'endorment des eaux à lent écoulement? Aucun fossile n'y est retrouvé. Devant ces raisons majeures, formelles s'efface une belle légende qui se heurte à l'impossible existence d'un lac à la Ponteyre.
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